« Le Dornier 24 est un hydravion trimoteur qui fut fabriqué en Allemagne par la Dornier-Werke pour la Luftwaffe, puis à partir de 1941 par l’entreprise française Weser et Potez. Sa construction continua après la fin de la guerre. Plusieurs versions furent produites pour : la reconnaissance maritime, l’évacuation sanitaire et le transport de passagers. Ce monoplan intégralement en métal, gros et robuste, se distingue par son fuselage central particulièrement large, avec un tirant d’eau bas, identique à celui des deux flotteurs latéraux. Long de 24 mètres, avec une surface alaire d’environ 28 mètres, il était équipé de trois moteurs BMW BRAMO 323R-2 de 9 cylindres en étoile, refroidis par air et développant une puissance d’environ 1000 chevaux. Sa vitesse de croisière était de 340 km/h à une altitude de 3000 mètres. Le premier juin 1949 le Dornier 24 assigné à la base aéronavale d’Aspretto, décolle tranquillement de Saint Mandrier pour destination Ajaccio. A mi chemin, mis à mal par le mauvais temps, il décide de revenir à sa base et lui signale un problème concernant un de ses moteurs. A proximité de Port Cros les choses tournent mal quand les trois moteurs s’arrêtent subitement. Le capitaine Bohain dirigeant l’appareil décide d’amerrir, mais le contact avec la surface de l’eau est particulièrement violent. Un des flotteurs se détache, l’avion se retourne et coule. Le pilote se tue sur le coup alors que les sept autres membres d’équipage sont sauvés par un bateau de pêche, l’Anne-Marie. Toute trace du Dornier 24 a disparu, excepté de vagues histoires racontées par les pêcheurs du cru, sans qu’une date ou un lieu soient mentionnés. L’existence de cette épave revint à la surface (si l’on peut dire) en 1999, suite à une rediffusion télévisée d’un film de la marine française, tourné en 1991 par deux sous-marins, le Griffon et le Triton. L’histoire raconte que le Dornier 24 fut découvert pendant un exercice des forces armées durant lequel une torpille dévia de sa trajectoire et fut perdu. Le dragueur de mines Thethys qui tentait de retrouver cette torpille fantôme tomba sur l’épave grâce à son sonar à balayage latéral. Le motif de changement de direction de la torpille devint alors clair : l’énorme masse métallique du Dornier 24. Pour l’histoire, la torpille est toujours visible à côté de l’avion. Pendant longtemps nous avons cherché l’emplacement précis de l’épave, jusqu’à ce que des amis disent le connaître par un hasard exceptionnel pendant une mémorable plongée. Pourtant il a fallu presque un an pour pouvoir faire une plongée d’exploration sur ce site, à cause des conditions météorologiques difficiles de l’année 2000. Enfin, au cours du mois d’août, le moment idéal arriva : mer d’huile, absence de courant, ciel bleu et soleil splendide ! Arrivés sur le site, nous ne trouvons pas tout d’abord l’épave au sondeur. Puis, après quelques minutes, à environ 100 m de profondeur, nous décelons sa présence grâce à un pic si clair et précis que nous pensons être en présence d’une autre épave. Après avoir lancé une ancre pour matérialiser son emplacement, nous nous immergeons, le cœur serré par l’émotion. Nos désirs sont enfin comblés quand à partir de 50 mètres nous nous rendons compte que nous sommes bien sur la bonne épave. En effet, la visibilité est tellement exceptionnelle que nous pouvons voir l’épave tranquillement posée sur le fond dans son intégralité : ailes, fuselage, gouvernail, hélice et moteurs pratiquement intacts. Une nuée d’Anthias s’enroule autour des structures et entre les fissures se tendent les antennes de nombreuses langoustes.
Un congre de dimensions conséquentes remue sur le fond. Son attitude démontre que les visiteurs ne sont pas fréquents, à tel point que je peux m’en approcher jusqu’à le toucher avec le hublot de l’appareil photo.
Les moteurs en étoile aux hélices à trois pales sont toujours là. Ce sont maintenant les demeures des langoustes, mostelles et congres. Les ailes sont cassées au centre, sûrement à cause de l’impact sur l’eau et la perte d’un flotteur. Le temps passe et nous prenons le chemin du retour. Une longue décompression nous attend, minorée heureusement par l’utilisation de TRIMIX comme mélange de fond.
Déjà pendant le premier pallier nous avons du mal à contenir notre enthousiasme et nous essayons de nous communiquer nos premières impressions par signes. Et la cerise sur le gâteau ! Nous avons la visite d’une raie manta (si, vraiment ! Une manta telle que l’on en voit aux Maldives), qui nous régale d’une nouvelle dose d’émotion, comme si ce que nous avions vu au fond n’était pas suffisant.
Quelle plongée inoubliable !
Les trois plongées suivantes nous laissent sur notre faim : il y a beaucoup à voir et la profondeur importante, qui limite notre temps au fond, ne nous a toujours pas permis de tout explorer.
Le peu de disponibilité durant la période estivale et la difficulté de regrouper une équipe suffisamment efficace pour effectuer l’exploration en profondeur de l’épave, a ainsi fait naître l’idée d’un nouvel objectif pour l’Xpedition Team.
Notre but est d’amasser un maximum de documents photo et vidéo sur cette si rare et belle épave, notamment en entrant dans la carlingue et le poste de pilotage, toujours inviolés.
Ces documents serviront par la suite à rechercher d’autres renseignements sur l’avion en question.
Le groupe sera formé de 8 à 10 plongeurs en plus des supports à terre et en mer. Nous organiserons des tours de telle façon à ce que chaque plongeur ne plonge pas plus de deux jours de suite.
Pour le gonflage nous aurons à disposition 4 compresseurs Bauer de 27m3/h, deux systèmes de mélange Nitrox/Trimix à flux continu et deux systèmes de gonflage par pression partielle avec filtration multiple.
Pour se rendre sur le site de plongée, situé à environ 25 min du port de Cavalaire, nous utiliserons un bateau pneumatique BWA 740 équipé spécifiquement pour la plongée technique.
Dans l’eau, la station de décompression sera sur trois niveaux (3-6-9 mètres). Elle sera formée de deux narghilés à l’oxygène pur pour un total de sept postes. »