"Les plus longues plongées effectuées avec ces appareils ont duré jusqu'à 24 heures", raconte Anatoly Sagalevich.
Travaillant pour l'Académie russe des Sciences, ce spécialiste a pris part à la conception des submersibles MIR 1&2, qui auront pour tâche d'explorer le Léman. "Jusqu'à aujourd'hui, leurs immersions se sont principalement déroulées dans les océans. Ici, nos explorations ne devraient pas aller au-delà des 5 à 6 heures. Nous serons dans un lac dont la profondeur dépasse tout juste les 300 mètres."
Les sous-marins russes affrétés par l'EPFL sont capables de descendre jusqu'à plus de 6000 mètres. "Ils ont servi à des opérations de sauvetage en haute mer, à des expéditions dans l'Atlantique, mais aussi à des tournages cinématographiques", enchaîne Michael Krasnoperov.
Le chef de projet au Consulat honoraire de Russie à Lausanne fait notamment référence aux expéditions qui ont emmené ces concentrés de technologie aussi bien à la verticale du Pôle Nord par 4200 mètres sous la calotte arctique pour étudier la croûte terrestre qu'aux tréfonds du lac Baïkal, ou sur l'épave du "Titanic".
Construits en Finlande en 1987 sous la supervision de l'Institut océanographique Shishov de Moscou, ils sont réalisés en acier résistant à une pression de 600 bars.
Micropolluants sous la loupe
Une mesure très largement suffisante pour mener à bien la campagne d'exploration du plus grand lac alpin (Elemo). Vice-président de l'EPFL pour les affaires académiques, Philippe Gillet détaille: "Nous sommes à la veille d'un grand projet interdisciplinaire, impliquant pas moins de dix institutions."
Suisses, britanniques, russes, françaises, américaines, toutes ont retenu leur souffle ces derniers jours en attendant le dédouanement du matériel, qui n'a pu se dérouler qu'hier matin peu après 7 heures sur les quais de la Sagrave au Bouveret!
L'objectif est commun: "Mieux comprendre l'impact de l'activité humaine sur le Léman. Ce milieu a été étudié par le passé, mais il garde en son sein les traces des époques antérieures et reste un écosystème en perpétuelle mutation." Dans ce contexte, des biologistes, physiciens, géologues vont en dresser un portrait qui se voudra le plus détaillé possible.
L'un des axes du projet concernera les micropolluants. Ces substances échappent encore dans une large mesure aux systèmes d'épuration modernes. Présents en quantité minime, ils contaminent par accumulation successive la chaîne alimentaire. L'avenir du Léman dépend dans une large mesure de leur compréhension.
Des années d'analyses
Si les plongées s'échelonneront de la zone des canyons de l'embouchure du Rhône du Haut-Lac jusqu'à Vidy en passant par les grandes profondeurs situées entre Lausanne et Evian, l'analyse des données par les équipes pluridisciplinaires prendra sans doute des années.
Au total, le budget dépasse les 4 millions de francs. Près de trois millions sont financés par la société Ferring Phamaceuticals qui emploie 4500 personnes dans le monde et 550 à Saint-Prex.